Le chameau de Hollande

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MALI – Bamako 11/4/13. En pleine crise politique interne liée à l’affaire Cahuzac, le Président français Hollande retrouve un peu de tranquillité grâce au dossier malien. Les opérations n’ont pas pris fin, la région de l’Azawad n’est pas entièrement sécurisée et la politique malienne n’a pas encore pris le dessus des armes.

Cependant, François Hollande a à nouveau son chameau. En effet, arrivé à Timbouctou le 2 février dernier, le président français avait reçu en cadeau un chameau. L’animal avait été ensuite confié à une famille locale qui en avait profité pour faire passer le chameau à la marmite pour un tajine. Une fois appris le sort de la bête, le gouvernement local a décidé récemment d’offrir un nouvel animal au président français et de l’envoyer directement à Paris. Un paradis moins «fiscal», mais bien plus sûr pour le chameau.

Concernant le dossier militaire malien, l’Opération Serval devrait voir ses effectifs se réduire de manière progressive d’ici peu de temps. Le nombre de militaire français intervenus dans le nord du Mali avait atteint les 4.000 hommes, mais les premiers retraits de troupes ont commencé le 9 avril dernier. Le processus de désengagement partiel prévoit d’ici juillet prochain une réduction à 2.000 hommes sur le territoire malien. 

Les actions dans la région de Gao et dans les montagnes au nord du pays continuent. La ville de Kidal, de fait, n’est pas encore totalement sécurisée et là aussi les opérations de combat vont bon train. Elles sont mises en œuvre essentiellement par des forces spéciales françaises, souvent avec l’appui des forces tchadiennes. Le travail du maintien du territoire devrait donc être réalisé par le restant des troupes françaises qui resteront sur place et par la Mission Internationale de Soutien au Mali – MISMA. Probablement c’est ce que craignent les maliens.

En effet, les Français effectuent un retrait militaire qui n’est pas si consistant, mais nécessaire. Le maintient de 4.000 hommes sur le terrain a un coût et le départ français était prévu. De fait, le désengagement français n’est pas total et les forces présentes dans le reste de l’Afrique occidentale représentent un apport stratégique utilisable en cas d’urgence. Ceci dit, ce sont les Maliens à être préoccupés par le retrait .français et pour différentes raisons.

En premier lieu, l’histoire des conflits de ces dix dernières années a montré quelle était la méthodologie employée par les mouvements insurgés  : asymétrie est le maître mot. La population du nord du pays a peur que les islamistes restants se soient retirés dans le désert pour revenir suite au départ des français, tout en continuant leurs activités de terrorisme dans les villes plus importantes, notamment Gao et Timbouctou. 

Deuxièmement, une fois les Français partis, les populations locales n’ont pas l’impression que leur sécurité sera assurée. Avec les Français, les seules troupes capables d’activités militaires dignes de ce nom, les forces tchadiennes, devraient se retirer elles aussi. Ainsi, les 1.000 hommes des troupes françaises, les troupes maliennes et les forces de la MISMA ne sont pas suffisantes pour le maintient de la sécurité de la zone. 

Enfin, c’est justement l’état de préparation de la MISMA qui crée des difficultés. La mission a pris six mois pour se mettre sur pied, politiquement d’abord, militairement ensuite. Une fois en vue de déploiement, la MISMA a montré toutes les difficultés d’une force de sécurité multinationale africaine, notamment d’un point de vue logistique. L’incapacité des forces de la MISMA était le doute principal soulevé par les Américains vis-à-vis d’une mission africaine au Mali dès les débuts de discussions au sein des Nations Unies. Aujourd’hui, le jugement de Washington ne s’est pas amélioré, au contraire. Un responsable du Pentagone, Micheal Sheehan, a déclaré récemment que les forces de la Cédéao étaient dans l’incapacité de mener des combats face aux groupes terroristes du Nord du Mali. 

Cette force de la MISMA, composée de 4.300 hommes, n’est donc pas en mesure actuellement de remplacer de manière minimale les troupes françaises et tchadiennes. Le président Tchadien, Idriss Déby, avait fortement insisté fin février au cours d’une rencontre avec les responsables de la Cédéao sur l’envoi et le déploiement opérationnel des forces de la MISMA. Malgré tout, cela n’est pas advenu. Pour sa part, l’ONU serait en train d’étudier la possibilité d’envoyer quelques  11.000 casques bleus pour prendre réellement le relai.

Ceci dit, après avoir œuvrer pour la sécurisation du nord du Mali, la France devra maintenant renforcer son dispositif de sécurité interne. En effet, le 7 avril dernier, le chef d’al Qaeda, Ayman al Zahawiri, ancien bras droi d’Oussama ben Laden, a menacé la France pour son intervention au Mali au sein d’un discours appelant à l’unité des musulmans et à la défaite des croisades mondiales des infidèles.